Sous ses airs d'innocente petite fille à papa se cachent des peines immenses. (Emily Black)

Aujourd'hui a lieu la première sortie pour Pré au Lard. Tous les élèves attendaient ça avec impatience depuis quelques temps. On n'est que début novembre, et déjà la neige tombe. Une fine couche blanche est présente sur les routes, mais je pense qu'elle partira aussi vite qu'elle est venue - du moins jusqu'à ce que la "vraie" neige arrive.

J'étais seul, pour changer. Keith et moi étant en froid, il restait à présent avec Nick. A présent, je me sentais comme si je n'avais plus rien à perdre. Et il faut dire qu'en effet, c'était le cas.

Je marchais en direction de Honeydukes, le magasin de sucreries, espérant qu'il n'y ait pas beaucoup de monde. Au moins, j'aurais un endroit où rester au chaud. Arrivé devant la vitrine, je soupire ; le magasin était bondé. Je fais demi-tour : Les Trois Balais serait peut-être moins fréquenté. Je marche, silencieux - en même temps, je ne vais pas parler tout seul - quand j'entends quelqu'un m'interpeler.

- Hey, toi ! criai-je au garçon devant moi.

Il se retourne, impassible. Je ne sais pas pourquoi je l'ai appelé, les mots sont sortis bien avant que mon cerveau ordonne à ma bouche de les retenir. Je rougis et m'avance vers lui - en même temps, que faire d'autre ?

- Tu es à Serpentard.

Il ne dit rien, n'acquisse pas ; je n'ai posé aucune question, ceci dit.

- Et tu es en première année.

Silence. Quelle conne ! Je l'ai appelé pour rien. Je ne sais pas quoi lui dire, et en plus de ça je lui raconte des choses qu'il sait déjà. Depuis le début de l'année, je rêve du moment où je pourrais lui adresser la parole. C'est peut-être bizarre, mais ce garçon m'attire. Physiquement et mentalement. Je ne sais rien de lui, et pourtant j'ai l'impression de le connaître. Les autres parlent tellement de lui ! Bon, pas en bien. C'est peut-être d'ailleurs pour ça que j'ai tant envie de le connaître ...

Il sourit, à ma plus grande surprise.

Elle ne rougit pas mais me donne l'impression d'être gênée. Cependant elle me fixe, son regard se voulant intimidant. Malheureusement pour elle, je suis le meilleur à ce jeu là.

- Et toi tu es Emily Black, Serpentard, première année.

Elle ouvre la bouche, stupéfaite, mais ne dit rien.

- Tu es l'orpheline de Londres.

Restant dans son silence elle me fixe, étonnée.

- J'aime me renseigner sur les personnes que je juge important de connaître. Je m'appelle Drago Malefoy. Pourquoi m'as tu interpelé ?

Ce gars là m'intriguait, m'intimidait. Je déteste qu'on sache autant de choses sur moi. Pourtant j'étais, d'après lui, une personne qu'il <<juge important de connaître>>.

- J'en sais strictement rien.

Et c'était la vérité. De toutes façons, je déteste mentir et je n'y vois là aucune utilité.

- J'ai beaucoup entendu parler de toi, Drago., dis-je. Pas en bien, rajoutai-je.

Il sourit. Ca l'amusait qu'on dise du mal de lui ? Quel être étrange.

- Tu me fascines., dis-je, les mots devançant mon cerveau une fois de plus.

Je ris d'un rire dénué d'humour.

- Tu ne devrais pas.

Je voyais clair dans son jeu. Encore une personne désirant me connaître, encore une fille voulant devenir quelqu'un pour moi. D'habitude c'est drôle de briser leur coeur, leurs espoirs. Mais là, je n'en ai aucune envie. J'ai peur que ça arrive.

- Tu en souffrirais., dis-je froidement.

Il avait l'air sérieux. Oui, sérieux, il l'était. Ainsi donc, Drago Malefoy était bien comme les autres aimaient à le présenter. Froid, distant, sans coeur. Pourtant n'était-ce pas une preuve de sympathie que de me conseiller de ne pas m'intéresser à lui ? Je souris à cette pensée.

- Qui te dit que c'est moi qui souffrirais dans l'histoire ?

Son visage céda son impassibilité à de l'étonnement.

- Je ne suis pas si différente de toi, dis-je en souriant. Sur le plan émotionnel, du moins.

J'ouvre la bouche pour répliquer mais, ne sachant que dire, je la referme. Cette fille est spéciale, c'est un fait. Je la regarde, observant ses traits, son visage. Aucune expression n'y est, elle est impassible ; tout comme moi. Finalement je souris.

- Dis-moi ce que tu me veux. Dis le moi clairement.

Je souris. C'était un défi que Drago me lançait, et j'espérais bien le relever avec brio.

- Je te veux toi.

Il ne répond pas, son visage ne montrant aucun sentiment.

- Je veux être celle qui pourra dire aux autres qu'elle est la personne la plus proche de Drago Malefoy, continuai-je. Je veux pouvoir dire aux gens que tu n'es pas ce qu'ils croient que tu es.

Je l'observe, silencieuse. Il n'est pas décidé à me répondre. Peut-être en veut-il plus ? Des gens nous regardent, de part et d'autre de la rue. Des élèves. Des filles. Il faut que j'arrive à me démarquer.

- Parce que je sais qu'au fond de toi il te reste ne serait-ce qu'un millième de coeur. Et j'aimerais qu'il m'appartienne.

J'entends des chuchotements, mais je m'en fous. Je ne peux dévier mon regard de Drago ; s'il faiblit, s'il sort de son impassibilité, je veux le voir de mes propres yeux.

Je ne sais pas trop pourquoi ni comment on en est arrivés là. Je ne sais pas non plus depuis combien de temps Emily attend de me dire ça. Mais ce que je sais, c'est qu'elle a raison ; il me reste bien un millième de coeur, et ce dernier s'est remis à battre en entendant le discours de cette fille.

Des gens nous observaient, guettant ma réponse. Mais qu'est ce que je dois répondre, moi ? On ne se connaît pas.

- J'ai soif, me contentai-je de dire.

Je reprends ma marche en direction des Trois Balais, Emily à mes côtés.

Je pense avoir réussi à le cerner, mais pas complètement je dirais. Je marche à ses côtés, silencieuse. Certes il n'avait pas répondu à mon discours, se contentant de changer de sujet ; mais au moins il ne m'avait pas rejetée.

On arrive devant les Trois Balais, on entre ; c'est beaucoup moins bondé que Honeydukes, mais on ne peut pas dire qu'il n'y a personne. Tous les regards sont tournés vers nous. Drago me prend par la manche et m'entraîne à une table vide. On s'assoit, toujours aussi silencieux. Une serveuse arrive, prend notre commande et repart. Les gens autour de nous chuchotent, nous lançant des regards en coin.

- T'as toujours été seul.

Il me regarde, sirotant sa Bièraubeurre que la serveuse avait apporté. Il ne répond pas, étant donné qu'une fois encore j'avais affirmé quelque chose qu'il savait déjà.

- J'aimerais pouvoir te comprendre complètement, murmurai-je.

Il sourit, toujours aussi mystérieux.

Je bois une gorgée de ma Bièraubeurre tout en observant les gens, leur attitude. Je sentais qu'Emily me fixait, essayant sûrement de me cerner.

- Arrête-ça, dis-je sans la regarder.

Au bout de 5 minutes, je me décide enfin à la regarder ; elle me fixe toujours. Je souris inconsciemment, ce qui la fait sourire à son tour.

- Vas pas t'imaginer des choses, je suis en train de me foutre de ta gueule.

Elle ne s'arrête pas de sourire pour autant. Je soupire, conscient qu'elle ne lâcherait pas l'affaire. Mais au fond, c'est peut-être ce que je veux ?

- Tu veux faire quoi, maintenant ?

Ca doit être la première fois que je demande l'avis de quelqu'un, ce que la personne a envie de faire.

Je souris.

- Je sais pas. J'ai envie de me rouler dans la neige., dis-je, rêveuse.

Il me regarde, les yeux grand ouverts. Je me contente de sourire en guise de réponse. Il hausse les épaules, soupire et se lève, remettant sa cape, son écharpe et ses gants. Je fais de même et nous sortons. Nous marchons pendant quelques minutes, cherchant un endroit où personne ne me verrait - ils me prendraient pour une folle et mépriseraient Drago. Une fois arrivés dans un endroit désert, je me jette à plat ventre dans la neige, oubliant qu'il n'y en avait qu'une fine couche. Je m'assis, gémissant de douleur. Il me regarde, soupire et s'approche.

- T'as mal où ? , me demande-t'-il, blasé

Je lui montre mon ventre sans dire un mot. Il soupire encore, sort sa baguette et murmure une formule que je ne connaissais pas en la pointant sur mon ventre.

- Merci, murmurai-je, la douleur partie. C'était quoi, cette formule ?

Je ne réponds pas. Elle me regarde, attendant apparemment une réponse. Je souris, me relève et lui tends ma main. Cette fille me change, espérons que ça en restera là, qu'elle ne me changera pas complètement.

- Tu m'as pas répondu, dit elle en souriant et en prenant ma main.

Je ne réponds toujours pas. Elle me tire par le bras, me faisant ainsi tomber à moitié sur elle. Je grogne et tente de me relever, mais elle me fait basculer sur le dos et se place à califourchon sur moi. Je reste toutefois impassible.

- Emily, si quelqu'un nous voie ...

- Alors quoi ? demande-t'-elle, son visage redevenant aussi froid que le mien.

- Alors rien, répondis-je simplement.

Je souris, espérant détendre l'atmosphère. Elle sourit à son tour, sa main montant et descendant tout le long de mon bras.

- Parle-moi de toi.

J'avais envie de la connaître, mais directement cette fois-ci. Elle sourit.

- Emily Black, orpheline. Mais tu le sais déjà ...

Il ne dit rien, attendant que je continue.

- Je n'aime personne à part moi-même, et c'est peut-être pour cette raison que tu m'apprécies.

Je soupire.

- Je ne sais pas quoi dire, sinon. Ma vie n'est pas très passionnante.

Il ne répond toujours pas.

- Je suis celle qui va remplacer la pierre de Drago Malefoy par un coeur, un vrai., dis-je en souriant.

- Impossible, répliqua-t'-il.

- Alors je ferais en sorte que cette pierre ne soit qu'à moi., dis-je sur un ton de défi.

Il sourit en coin. Je me penche sur lui, plaçant mes avant bras de chaque côté de sa tête.

- Laisse-moi...juste une fois..., murmurai-je.

Mais avant que mes lèvres ne touchent les siennes, il me repoussa légèrement et se releva.

- La neige, c'est heum... Froid., dit-il, embarassé. Tu viens ?

Il me tendit sa main pour me relever. J'hésitai un instant puis la pris, la mine renfrognée.

Nous marchions en direction de Poudlard. Pour ma part, je suis fatigué ; elle, je ne sais pas. En tout cas, elle a l'air énervée. Peut-être parce que je l'ai repoussée..Sûrement, en fait. Je la regarde tandis qu'elle évite de faire de même de son côté. Je soupire.

- Tu comptes me faire la gueule pendant longtemps ?

Elle ne répond pas, mais je devine qu'elle en crève d'envie. Je souris et mets une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. Elle rougit.

- Je suis à peine fait pour avoir des amis, alors pour avoir une copine j't'en parle même pas, dis-je sur un ton d'excuse.

Elle grogne, mécontente. Je soupire.

- De toutes façons aucune autre fille ne peut ne serait-ce qu'espérer être avec moi.

Elle sourit enfin.

- Beau parleur, me dit-elle en soupirant.

- Non, je suis sincère.

Et à mon plus grand étonnement, je le suis vraiment.

Je rougis. Drago a ce petit plus que les autres n'ont pas.

- J'ai pas envie de rentrer maintenant, chuchotai-je alors que nous étions à la moitié du chemin menant au château.

Il soupire et s'arrête.

- Tu veux faire quoi alors ? J'suis fatigué moi.

Il avait dit ça d'un ton tellement froid que j'en eus des frissons. Il soupire à nouveau et, à mon plus grand étonnement, me prend dans ses bras.

- Heum...Désolé, dit-il. C'est juste que j'ai pas dormi de la nuit.

Je ne sais pas très bien pourquoi je l'ai prise dans mes bras, mais maintenant je n'arrivais plus à la lâcher. Je dus me forcer à le faire ; la peur de m'attacher à quelqu'un reprenait le dessus.

Elle soupire, mécontente.

- J'ai pas envie de m'attacher à quelqu'un.

Ces mots eurent l'effet de rendre le visage d'Emily encore plus sombre qu'il ne l'était déjà. Je gaffais, je le savais, mais je ne sais pas comment m'y prendre. Après tout c'est la première fois que ça m'arrive, et puis ...

- Si c'est de l'amour que tu veux, tu es tombée sur la mauvaise personne.

Elle ne répond pas, ne me regarde même pas. Je soupire.

Au fond, je le connais. Je savais qu'il ne s'attacherait pas à moi. Pourtant je le veux ; depuis le début. Je souris tristement.

- Je sais déjà tout ça, murmurai-je. Mais je pensais que peut-être...

J'ai honte.

- Tu pensais pouvoir me changer ? me demanda-t'-il.

J'acquisse, honteuse. Il prend mon menton dans sa main et relève mon visage. Il soupire et dépose ses lèvres sur les miennes.

- Heureuse ?, me lança-t'-il.

Je ne dis rien mais souris. C'était un tout petit baiser, mais il signifiait beaucoup pour moi.

Je souris à mon tour, puis soupire.

- C'est fou tout c'que j'fais pour toi, murmurai-je. Alors qu'on ne se connaît que depuis quelques heures, même pas!

Elle hausse les épaules.

- Ca t'arrange, hein ? dis-je en souriant.

Elle sourit et hoche la tête en signe d'approbation.

- On rentre, maintenant ? J'ai des devoirs à faire ... Et j'suis crevé.

Elle acquisse et nous repartons en direction du château.